edurtreG est un « outil » virtuel qui examine et « regarde » Gertrude (voir « Qu ‘est-ce que Gertrude ? »).

Il se présente comme Gertrude sous la forme d’un blog mais à la différence de ce dernier, il n’est composé que de textes.

La succession d’articles publiés ne dépend que de l’état de la réflexion que je mène sur Gertrude ce qui implique une certaine irrégularité dans le contenu et la temporalité.

samedi 8 septembre 2012

Décompte du temps





Gertrude compte le temps et le temps compte pour Gertrude ; à se demander si Gertrude ne repose pas entièrement sur ce décompte, si elle n’est pas juste du temps compté.

Il est pourtant évident que le temps ne concerne plus le crâne Gertrude qui est objectivement le reste d’une personne décédée dont la temporalité s’est arrêtée le jour même de la mort.

Même si le crâne a une temporalité propre depuis sa reconnaissance en tant qu’objet indépendant de l’histoire d’une personne, ce temps est le mien bien plus que le sien.

Le temps est un phénomène que nous comptons à partir d’une naissance, quantifiable à partir de ce point de départ, mais c’est également ce qui nous sépare de notre mort, sorte d’étendue à l’épaisseur d’autant plus présente qu’elle nous est inconnue.

J’ai créé le blog de Gertrude le 3 janvier 2008, et depuis, tous les trois du mois, je célèbre sa présence sur la Toile par un article ; Gertrude ainsi dotée d’une « naissance » ne se laisse pas oublier, elle acquiert une forme d’existence ; le temps en marche lui déroule un avenir, chaque « trois » la propulsant vers la prochaine échéance, transformant son errance en marche motivée, cadrant l’informe de son temps arrêté par des laps de durées déterminés et délimités.

La pendule mise en route, Gertrude espère donc une nouvelle mort et vit à nouveau. Ce déroulement ne peut se produire qu’à partir de ce point initial choisi arbitrairement, et dont le caractère justement arbitraire en fait la précision.

Car le véritable « début » de Gertrude reste, quant à lui, dans le vague ; le crâne, dénommé « Gertrude » par mes soins, n’existe à mes yeux que depuis que je l’ai trouvé (j’explique les circonstances de cette « rencontre » ici).

Peut-on dire qu’il existait avant ?

Avant d’être « à moi » ce crâne porte avec lui une réalité objective d’avoir été organe interne à un être vivant humain sans pour autant en incarner à lui tout seul la singularité ; puis après la mort de ce dernier, il accéda à la visibilité d’une structure osseuse mise à nu dans un but d’étude scientifique ; cet état d’objet scientifique faisait oublier toute identité de la personne dont il avait été un élément organique, et le faisait entrer dans un anonymat nécessaire à sa fonction.

Quant à moi, je ne saurai jamais « qui » fut Gertrude avant sa mort, mais j’ai « personnifié » le crâne peu à peu, muant son statut d’objet scientifique en celui d’objet poétique, en lui donnant un nom, mais également en l’intégrant à la temporalité d’une sorte de fiction ; cette temporalité ne peut cependant qu’être la mienne, celle de Gertrude étant fondée sur l’amnésie.

La « perte de mémoire » de Gertrude, le vide paradoxal de cette vie passée justifie son « remplissage » par ma propre mémoire, mon propre retour sur le passé, ainsi que le décompte de mon temps de plasticienne : ainsi mon temps autour de Gertrude se matérialise par une activité régie par des échéances, compensant le « non-su » ou « rien-su » à propos du crâne par un usage pléthorique et absurde de la scansion du temps.

De la même façon ce décompte reste dans cette aventure virtuelle ce qui se rapporte le plus à ma propre réalité, et qui calque ma propre vie.

6 commentaires:

  1. Les anniversaires sont plus rapprochés chez Gertrude ainsi le temps semble plus court,ce qui fait que le cycle gertrudien rapproche plus vite de la tombe.

    RépondreSupprimer
  2. Je me sens en effet sur la pente descendante et en fin ascendante.

    RépondreSupprimer
  3. Je vous imagine très bien sur votre lit de mort, Gertrude entre vos mains... jetant votre regard vacillant dans ses orbites béantes... la pressant sur votre poitrine affaiblie comme pour y puiser la force de mourir... comme pour la congratuler de la force créative qu'elle va a léguée... Apaisée après avoir tant compté le temps, je vous vois câliner la grande faucheuse comme une tendre amie qui vous doit un surplus de vie.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il fait encore jour, alors cette image m'amuse beaucoup. Maintenant, j'essayerai de ne pas l'évoquer quand il fera nuit!

      Supprimer
  4. Une valse à 3 temps...
    Est-ce que un crâne plongé dans la mer flotte ? Une question absurde qui m'est venue, là...Où est-ce que il s'enfonce avant d'émerger comme une certaine lampe?...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Un crâne qui coule à force d'être submergé à moins que cela ne soit le rafiot dans lequel il est embarqué contre vents et marées. Je renonce à trouver pour l'instant une lampe à bec d'argent ; je me contenterais juste d'une petite lampe avec un petit génie dedans; je ferai trois voeux: primo du temps, Secundo du temps, tertio du temps.

      Supprimer