Gertrude, toujours Gertrude…
Plus
j’avance (avancer est une illusion) dans ce travail (franchement ce
n’est pas un travail, sinon je ne le ferais
pas, surtout que je ne gagne pas un rond), dans ce parcours (est-ce
bien un parcours ? Dans un parcours, il faut partir d’un point pour
arriver à un autre…), dans cette aventure (quelle
aventure ? Il y a trop peu de rebondissements pour employer ce mot),
cette histoire (j’ai beau essayer de le faire croire, il y en a pas ;
et puis une histoire sous-entend une
narration, une temporalité, enfin vous voyez ce que je veux dire…),
cette démarche (tout cela est parfaitement immobile et ne nécessite en
rien de mettre un pied devant l’autre), cette pratique
(je ne fais pratiquement rien), cette entreprise (je ne produis rien
et surtout rien de rentable), bref plus j’avance (sans avancer), plus
le temps passe (passe-t-il tout seul ?) dans cet
espace (voici un terme intéressant, si j’ai encore la capacité à
m’intéresser à quelque chose : l’espace, une notion adaptable en deux
dimensions, en trois dimensions, au temporel, au réel,
au virtuel et à je ne sais quoi encore…) intitulé Gertrude
(allons-y, n’ayons pas peur du ridicule ! « un espace intitulé
Gertrude », que c’est ronflant et grotesque à la
fois ! Mais cela fait longtemps que le rire tue Gertrude et me
ressuscite ; bon, voici que je commence, ou continue, à dire n’importe
quoi…)…
Mais
venons-en au fait… Je disais donc (quelle prétention !) : Gertrude que
je « fais » (cette
formulation est laide, je sais, mais il s’avère que c’est
probablement la plus juste, même si en réalité je ne « fais » rien que
tourner autour d’un pot au « Feue » déjà fait)
depuis plus de six ans (ça, au moins, c’est objectivement vrai) dans
cet espace virtuel (ouf, je l’ai dit, même si cette notion est
contestable) est un motif (peut-on encore employer ce terme
après Cézanne ?) qui, à force d’être répété (plutôt devrais-je
dire : mis à toutes les sauces, obsessionnellement utilisé en tout,
collé de manière absurde à toutes sortes d’objets ou
de situations) perd tout son sens (faut-il encore qu’il ait eu du
sens un jour, ou alors un sens hors de tout bon sens, ou auquel le bon
sens n’aurait pu trouver du sens sans perdre le sens des
réalités).
Mais
de la perte de sens (jolie formule qui cache peut-être une perte de
vitesse ou une perte de souffle dans ce
« faire », surtout que « vitesse » et « souffle » appartiennent
plutôt au vocabulaire des « vivants », monde auquel Gertrude
n’appartient plus. Et
moi ?) que va-t-il émerger ?
C’est peut-être ici que tout commence (mais je l’ai déjà dit plusieurs fois).
Juliette Charpentier, février 2014
Dans un sens, on n'est pas censé être sensiblement sensé...
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