edurtreG est un « outil » virtuel qui examine et « regarde » Gertrude (voir « Qu ‘est-ce que Gertrude ? »).

Il se présente comme Gertrude sous la forme d’un blog mais à la différence de ce dernier, il n’est composé que de textes.

La succession d’articles publiés ne dépend que de l’état de la réflexion que je mène sur Gertrude ce qui implique une certaine irrégularité dans le contenu et la temporalité.

samedi 8 septembre 2012

Blog



La définition du « blog » serait un « journal intime sur Internet », le but en est apparemment contradictoire, secrètement alléchant, singulièrement immature : celui d’exposer aux yeux potentiels de tous ses petites affaires secrètes .

La vocation du secret n’étant pas de se proclamer en tant que secret et de susciter le désir de sa révélation ?

Une des premières questions à propos de Gertrude serait peut-être le pourquoi d’un blog. Quand je me suis lancée dans l’entreprise (et c’est bien toujours ce mot « entreprise » qui me vient à l’esprit à son sujet), c’était comme un pari, presque une expérience hasardeuse que je pensais sans avenir.

La perspective me tentait autant qu’elle me repoussait ; l’idée première était de créer une sorte de fiction autour du personnage de Gertrude, et à travers ce faux « journal », en nouer l’intrigue.

Je me suis lancée probablement lors d’une certaine période de vacuité dans ma pratique ; l’expérience en était une parmi d’autres, sa pérennité ne devait pas excéder quelques jours, voire quelques semaines.

Quatre ans et demi après, force est de constater qu’il n’en est rien, que les idées (la dernière en étant peut-être « edurtreG ») continuent à se bousculer pour alimenter l’aventure, que l’aventure a largement supplanté l’expérience  malgré une certaine lassitude actuelle de ma part à participer aux échanges qu’elle suscite.

Je suis, en effet, arrivée un stade paradoxal : celui de reconnaître dans le blog son absolue nécessité en tant que moteur de ma pratique et son impuissance à être un espace « d’exposition » efficace, du moins satisfaisant, de cette dernière.

Ce qui frappe dans l’usage du blog, et qui en crée le besoin, presque l’addiction, c’est la puissance de l’échange avec les interlocuteurs.

Le phénomène de la « rencontre », et qui plus est, avec des inconnus, est si fort qu’il en est bouleversant ; au point qu’il a pu, surtout au début, primer dans mes motivations sur le véritable contenu du blog que je souhaitais comme une performance artistique.

C’est, en effet dans cette « dérive » que les mots « navigation » « rafiot » « Capitaine » ont pu apparaître ; le blog de Gertrude était définitivement un rafiot (avec toutes les concessions de rafistolage que cela sous-entend) à la dérive d’une navigation à vue, en proie aux rencontres hasardeuses plus ou moins heureuses ; et j’en était le Capitaine ivre et désorienté ; je renonçais, là, à toutes sortes de principes ou d’a priori éthiques que j’avais pu me fixer avant l’ouverture du blog.

Je me raccrochai à la devise « Rien n'était prévu, rien ne sera laissé au hasard. ». Je décidai que tout ce qui « tomberait » dans le blog en ferait la matière… et mon miel.

Évidemment le système ne pouvait et ne peut toujours fonctionner que sur une forme d’échange : je publie un « article » et j’attends les réactions de mes interlocuteurs. Au mieux, ces réactions peuvent susciter de nouvelles idées de ma part et ainsi mettre en marche une véritable interactivité, phénomène qui a tendance actuellement à se raréfier probablement à cause de ma perte d’intérêt (momentanée ou définitive) à l’égard des « conversations » virtuelles.

L’élaboration de l’article est toujours le fruit d’une grande motivation, d’un désir impatient, mais il est aussi le support d’une attente très forte vis-à-vis de l’Autre, une sorte de fantasme de reconnaissance de sa part, presque d’une preuve d’amour.

Et c’est là, peut-être, que s’installe le paradoxe : celui de continuer à produire dans ce dispositif, d’être toujours mue par cette impatience et de me heurter toujours à la même frustration de cette attente impossible qui me tenaille à chaque parution : celle que produit le décalage inévitable entre ma pratique et sa réception par mon « public ». Décalage que je sais et que j’entretiens pourtant sciemment mais que je redoute.

Et plus j’avance, plus je constate chez moi cette insatisfaction (probablement liée au désintérêt décrit plus haut, dans un sens ascendant ou descendant que je n’ai pas encore défini), cette course aporétique qui ne cesse de m’agiter ; et à présent, c’est cette insatisfaction qui devient l’objet de mon attention. De désagrément, elle devient source d’intérêt. edurtreG en est probablement une des conséquences.

Ainsi le blog m’apparaît comme une bonne démonstration, voire comme une parodie, du processus artistique en mettant en exergue l’irréductible impuissance qui l’habite.

Mais j’aurai l’occasion d’y revenir.

De l'instant




Une des principales difficultés rencontrée dans ce nouveau blog est l’idée qu’il me faut le concevoir sans aucun carcan logique, sans règle si ce n’est celle de m’exprimer correctement.

Ce sera pour moi la seule façon de traduire l’état d’incertitude et de fouillis dans lequel se trouve ma pensée au sujet de Gertrude.

Je sais ainsi que mon propos ne sera ni linéaire, ni régulier, qu’il sera parfois redondant, contradictoire voire incohérent, mais qu’il sera toujours le résultat d’une forme de vérité de l’instant ; car c’est toujours l’instant qui compte dans une pratique, même si cet instant est engendré par un temps précédent et qu’il aura des conséquences à venir.

Ce que j’ai réalisé il y a quatre ans et demi déjà ne m’appartient plus mais, malgré tout, constitue le fond ou le pied de cette construction qui, bien que virtuelle, ne s’en appuie pas moins, à travers l’accumulation de ces tranches de temps, sur ma réalité.

Il faudra que le visiteur se retrouve (ou pas) dans ces méandres, ces bribes lâchées peu à peu sur ma pratique.

Logique du temps



Commencer à écrire sur ma pratique en résume toute la difficulté ; en effet commencer par quoi ?
Je m’aperçois, en lisant mes premières lignes que j’ai déjà écrit trois articles sans parler une seule fois du véritable objet de ce blog, à savoir Gertrude. À l’évidence j’ai autant de difficulté à en parler que j’ai de facilité à produire des mises en scènes à son propos.

Le « commencer par quoi ? » me replace face à la nécessité de trouver un fil, de tirer un premier fil de ma pelote, encore faut-il que cela soit le bon, celui qui entrainera, enchainera la cohérence de mon propos ; mais il me semble que je dois me défendre de ce penchant si je veux garder un minimum de sincérité.

Et naturellement je ne peux commencer que par ce problème de la logique : la logique de Gertrude, plutôt celle que je lui ai fabriqué dans l’espace virtuel.
Car, a priori, il n’y a pas vraiment de logique ni d’évidence à se retrouver face à un crâne ; la seule réalité du crâne est la tangibilité de sa matière, rien d’autre ; le reste n’est que fantasme, car sa réalité de reste humain ne rencontre pas la notre, et son état nous est inenvisageable, au sens propre comme au sens figuré, si j’ose le dire ainsi.

Mais j’aurai l’occasion de revenir sur ce problème de réalité ; ce qui m’intéresse ici c’est la construction que j’ai pu fabriquer autour de Gertrude pour que toute cette affaire tienne debout, pour que « Gertrude » accède à une forme de réalité, presque de réalisme.
Gertrude, ou plutôt l’ensemble des espaces virtuels la concernant, répond entre autre à une logique implacable, un cadre indéfectible, celui du temps ; pas un temps subjectif, mais le temps objectif, celui de la pendule ou du calendrier.
Car une des « réalités » qui s’impose dans le face-à-face auquel je m’adonne depuis quatre ans et demi, c’est le décalage entre son temps arrêté et le mien qui continue à filer.
Dans le(s) blog(s) de Gertrude, la scansion du temps s’est installée tout naturellement, presque inconsciemment ; d’abord dans le rythme du blog lui-même, « journal » virtuel qui demande son dû et se rappelle à nous dès que nous le négligeons tant soit peu ; le blog de Gertrude est une sorte d’organisme qu’il faut nourrir, et il n’a pas fallu longtemps avant qu’il ne joue le parallélisme avec mon propre organisme, mon propre cycle vital. D’élément immobile et mort, Gertrude, par le truchement du blog, et ses exigences de « journal » a acquis une forme de faculté, celle d’avancer, d’évoluer, de penser, de parler ; cela devient un élément agissant, ou plutôt un élément qui me permet d’agir.
Des glissements voire des dérapages de cette confrontation, j’aurai l’occasion d’en parler plus en détail ; comme je développerai également les fonctions de cette temporalité.
Mais le temps n’est pas la seule logique des blogs de Gertrude.

Miroir de Gertrude


edurtreG est en quelque sorte le miroir de Gertrude, un espace où elle est censée se regarder sans complaisance, mais également ce lieu où l’image reflétée oscille entre déformation volontaire, de la grimace à la tentative d’embellissement, et vérité. L’image est virtuelle, d’autant plus virtuelle que l’objet qu’elle redouble n’a de raison que l’espace virtuel d’Internet ; elle est en même temps reflet des activités gertrudiennes par l’explication, l’analyse, la prise de distance vis-à-vis de ces dernières, mais aussi le contraire de ce qui est montré dans le blog de Gertrude qui fonctionne sur des choix implicites (pas toujours perçus par mes interlocuteurs) ; en effet  edurtreG ne sera que du texte et penchera forcément plutôt du côté de l’explicite.

edurtreG

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edurtreG est une tentative de recul critique par rapport au travail que j’ai entrepris depuis quatre ans et demi autour d’un crâne humain nommé Gertrude.
Vous pouvez prendre connaissance de ce travail ici.

Je ne prétends pas, dans cette expérimentation, conserver toujours une grande objectivité à l’égard de mes activités mais seulement ouvrir un espace de réflexion dans lequel il me sera possible non seulement d’analyser ma démarche, mais aussi de livrer mon ressenti dans cette aventure. 

Il me paraît important également d’inviter les visiteurs à faire part de leurs points de vue, les plaçant là, non comme « interlocuteurs » de Gertrude faisant partie intégrante du jeu, mais en tant que « spectateurs » de mon travail plastique et de sa construction. Libre à eux, bien sûr, d’endosser les deux rôles.

edurtreG, contrairement à Gertrude, sera un blog sans aucune logique particulière à part celle dictée par le désir que j’éprouverai à m’exprimer sur la question.
L’ouverture de ce sixième blog, projet certes déraisonnable, intervient arbitrairement dans l’histoire d’une aventure qui a beaucoup évolué au point d’être à présent très éloignée du projet initial et au risque que je m’y égare ; et c’est probablement ce sentiment, contraire aux apparences, de désorientation et de non-maitrise de l’expérience qui m’a décidé à envisager ce nouvel espace .

À ce stade, éprouverais-je donc le besoin d’expliciter ou de justifier ma démarche à mes yeux autant qu’aux yeux des autres ? Ou sans vraiment me l’avouer, suis-je en train de lancer un nouveau tentacule à la pieuvre Gertrude dans l’impuissance de contrôler les autres ?
Je ne le sais, seule l’évolution de ce nouveau blog me le dira.